La Commission Nationale des Comptes de Campagne et des Financements Politiques (CNCCFP) est sortie de l’anonymat l’année dernière lorsqu’elle a refusé de valider le compte de campagne de Nicolas Sarkozy pour l’élection présidentielle de 2012 ; décision validée ensuite par le Conseil Constitutionnel. Le grief porte sur la réintégration dans les comptes de campagne de dépenses supplémentaires, notamment la totalité du coût d’un meeting à Villepinte que la commission souhaite réintégrer entièrement, alors que le mandataire financier de Nicolas Sarkozy avait pris en compte 50% au titre d’une dépense électorale. Cette réintégration a provoqué un dépassement du plafond de dépense, ce qui signifie que le candidat ne peut plus prétendre au remboursement public. La CNCCFP justifie cette réintégration en invoquant la nécessité de faire une distinction entre l’activité d’un élu et ses activités de campagne en tant que candidat à sa réélection.
Sur le principe, l’idée de lutter contre le fait pour un homme politique en place de bénéficier de budget discrétionnaire (les frais de cabinet en particulier) attaché à sa fonction et utilisable dans un but électoral semble totalement justifiée puisque cela lui octroie un avantage financier important vis-à-vis de ces concurrents. Pour autant en pratique aucune distinction objective ne peut être faite entre une activité publique et une activité électorale d’un élu. En effet, à partir de quel moment ou pour quelle décision un élu est-il en campagne pour sa réélection ?
Nous n’avons pas aujourd’hui de critère permettant de faire cette distinction ; et l’objectif de distinguer pratique de mandat et pratique électorale semble inatteignable, puisque la science politique a bien démontré depuis des décennies l’imbrication entre politics et policy. La définition réglementaire des dates de la campagne électorale n’est pas suffisante puisqu’en 2012 pour les deux principaux candidats, l’un s’est déclaré candidat bien avant le début de la campagne officielle et l’autre une fois cette campagne ouverte.
Mais au-delà de l’impossibilité d’appliquer ce principe, on peut anticiper que cette décision de la CNCCFP va avoir au moins trois conséquences importantes sur la question de l’argent en politique. Le premier effet est celui d’une politisation à venir de la CNCCFP. En effet, comme la commission joue un rôle post-électoral de plus en plus important, en particulier en termes financiers pour les candidats, elle va faire l’objet d’un intérêt croissant de la part des hommes politiques. Il faut donc s’attendre à un développement des pressions, de toute nature, sur la commission et en particulier lors des nominations en son sein. De plus, les recours auprès de la CNCCFP et des juges vont se multiplier au nom de cette question des activités des élus. La question a déjà été soulevée à la suite de déplacements de ministres dans un certain nombre de municipalités.
Le deuxième effet est que cette décision va accroitre l’incertitude autour des comptes de campagne. En effet, l’activité de réformation des comptes par la CNCCFP commission (la réformation d’un compte par la CNCCFP correspond à une modification des sommes prises définitivement en compte) crée une incertitude très forte pour les candidats, d’autant plus forte que l’enjeu est important : il peut aller de l’absence de remboursement public à l’annulation de l’élection débouchant éventuellement sur une inéligibilité pour le candidat concerné. Cette incertitude provient du fait que le législateur n’a pas voulu définir a priori ce qu’est une dépense électorale. Si cette décision peut apparaître de bon sens car une telle définition parait impossible en pratique, elle a donné un pouvoir important à la commission et aux juges administratifs qui traitent des litiges en leur laissant le soin de faire le tri entre ce qui relève de la dépense électorale parmi l’ensemble des dépenses présentées par les candidats.
Par exemple, en 2007, la commission avait pris concernant le compte de campagne de Ségolène Royal la décision suivante : « Considérant que, parmi les dépenses exposées au compte de campagne, figure une somme de 51 659 euros de frais de maquillage et de coiffure ; que s'agissant de dépenses habituellement de nature personnelle et imputées au compte pour un montant manifestement excessif, il sera fait une juste appréciation de la contribution de ces dépenses à la campagne électorale en ramenant cette somme au tiers de son montant, soit 17 220 euros ». Sur une telle décision, on peut s’interroger premièrement sur sa pertinence (un candidat mal coiffé ou mal maquillé peut-il remporter une élection ?) et sur le choix de réduire la dépense au tiers (pourquoi un tiers et pas la moitié ?). Les exemples sont nombreux (et parfois comiques sur les frais de coiffure, de pressing, et sur la capacité du régulateur à distinguer la composante électorale parmi les frais de déplacement ou de repas) sur ce que la commission considère ou non comme une dépense électorale et dans quelles proportions ? Le résultat de cette incertitude est que les comptes de campagne et donc les stratégies de dépenses et de collecte sont constitués de telle manière à conserver une marge de manœuvre, notamment vis-à-vis du plafond de dépense, en cas de réformation trop important des comptes par la commission. Dans tous les cas, il est possible que la sincérité des comptes soit affectée par cette incertitude. Et, d’ors et déjà, les candidats aux élections municipales semblent avoir du mal à obtenir des prêts de la part des banques pour financer leur campagne du fait de cette incertitude plus forte.
La troisième conséquence concerne la question du statut de l’élu candidat à sa réélection. Si la décision de la CNCCFP concerne l’élection présidentielle, il faudra que cette logique s’applique également à toutes les autres élections nationales ou locales. On pense en particulier, dans la perspective des prochaines élections municipales, aux activités des maires sortants. Cela signifie que la commission, pour rester cohérente avec sa décision, va devoir vérifier toutes les activités des élus lors de campagnes locales, qu’il s’agisse de campagne de réélection au même poste ou de campagne d’hommes politiques qui cumulent ou cherchent à cumuler. Par exemple, comment prendre en compte l’activité électorale d’un conseiller général candidat à une élection municipale ? Autant dire que la commission va avoir du travail. Mais comme elle ne possède pas les moyens d’une telle politique, le risque pour elle est grand d’une perte de légitimité et de crédibilité.
Il est à craindre qu’au final, face à une norme réglementaire très instable, les décisions de la CNCCFP vont faire l’objet d’une lecture de plus en plus politique, ce qui nuira à son travail et à l’objectif plus global de transparence et de moralisation du financement politique.
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lundi 17 février 2014
mercredi 12 février 2014
La loi sur le mariage homosexuel en France : ni prématurée, ni contreproductive.
La loi du printemps 2013 sur le mariage homosexuel et les
manifestations qui ont suivi ont ouvert deux questions. Les français
étaient-ils prêts à accepter une telle évolution ? Cela n’a-t-il pas
produit, en fin de compte, plus l’hostilité à l’égard de
l’homosexualité dans la société française ? A partir des enquêtes
d’opinion, nous répondons résolument oui à la première question et non à la
seconde.
Les français
étaient-ils prêts ?
L’enquête Valeurs de 2008 (EVS, http://www.valeurs-france.fr/) permet de
comparer l’opinion des Français à celle des autres pays européens. Si l’on
combine trois questions mesurant la tolérance à l’égard des homosexuels – la
première demande aux répondants s’ils justifient l’homosexualité, la deuxième
s’ils sont pour ouvrir le droit à l’adoption aux couples homosexuels et la
dernière s’il y a des membres de certains groupes qu’ils n’aimeraient pas avoir
pour voisins – on peut construire un index synthétique allant de 0 (intolérance
maximale à l’égard des homosexuels) à 27 (tolérance absolue). La valeur moyenne
de cet index par pays indique clairement que la France fait partie des pays où
le climat d’opinion est le plus tolérant, avec l’Islande, les pays scandinaves,
les pays du Benelux et l’Espagne (dont la plupart a déjà adopté une loi sur le
mariage homosexuel).
Niveau moyen de tolérance à l’égard de
l’homosexualité
Le
niveau moyen élevé de tolérance observé au niveau agrégé du pays pourrait, bien
sûr, masquer une forte polarisation. L’analyse de la distribution des Français
sur une échelle recodée en quatre catégories semble, au contraire, indiquer que
les personnes radicalement intolérantes à l’égard de l’homosexualité
représentent une faible minorité (5% exactement), tandis que près de 80% des
répondants français se situent dans les deux catégories les plus tolérantes.
Distribution (%) des réponses des Français
Distribution (%) des réponses des Français
Il semble ainsi parfaitement cohérent, compte tenu du climat d’opinion en Europe, que la France ait été, après notamment les Pays-Bas, la Belgique, l’Espagne, l’Islande et la Scandinavie, la prochaine sur la liste des pays permettant aux couples homosexuels de se marier.
La loi a-t-elle crée
plus d’hostilité à l’égard des homosexuels ?
Une façon de répondre est
d’analyser l’effet des lois passées dans les pays européens et en France (le
PACS) sur l’opinion publique.
Le tableau ci-dessous est une
analyse multivariée pour prédire le nombre de personnes qui n’aimerait pas
avoir un voisin homosexuel. Nous avons analysé l’effet du pays (nous comparons
15 pays, puisqu’il existe, comme on l’a vu, de fortes différences culturelles),
de la date (nous disposons de trois dates : 1990, 1999 et 2008) et surtout
celle de la reconnaissance légale des couples homosexuels. Les pays qui n’ont
pas légiféré entre 1999 et 2008 sont considérés dans l’analyse comme sans
(nouvelle) réglementation, indépendamment du fait qu’ils en aient adopté
auparavant (comme le Danemark) ou pas (Italie). L’analyse permet ainsi
d’établir si l’adoption d’une loi et les débats qui l’entourent ont un effet ou
pas.
Qui
n'aimerait pas avoir des voisins homosexuels?[1]
|
|
par rapport
à 1990
|
|
1999
|
-10%
|
2008
|
-15%
|
EFFET
NET DE LA LOI
|
-4%
|
Le tableau montre que :
1. Le temps joue en faveur de l’homophilie. En 1999 il y a
en Europe 10% d’homophobe en moins que neuf ans auparavant, et en 2008 15% en
moins.
2. Le fait d’avoir légiféré sur les couples homosexuels dans
les neuf années qui précèdent le sondage est associé à une baisse moyenne de
l’homophobie de 4%.
Statistiquement, l’acceptation
massive de l’homosexualité qui prévaut parmi les Français a donc toutes les
chances de s’accroître encore. Bien qu’il soit encore trop tôt
pour juger si la France ne va pas être une exception à cette règle, un premier
bilan peut être fait. L’enquête dynegal, conduite à
l’été 2013, en plein débat sur la loi Taubira (http://www.dynegal.org/),
permet de comparer l’opinion des français sur la justification de
l’homosexualité avant le débat (2008) et pendant (2013). Les résultats montrent
une chute de 10% de la proportion de Français considérant que l’homosexualité
n’est jamais justifiable, et une augmentation de 18% de ceux qui la trouvent
toujours justifiable.
***
Si le mariage pour tous a été
adopté dans un climat d’opinion largement favorable, si ce climat est
statistiquement et empiriquement amené à se renforcer, pourquoi les
mobilisations hostiles au mariage homosexuel semblent-elles donner l’impression
contraire ? Trois étudiantes de Sciences Po Grenoble - Isaure, Léa et
Félicie – ont interrogé des militants d’associations de défense des droits des
homosexuels. Elles observent que la moitié d’entre eux perçoit un changement
négatif depuis le débat sur la loi des attitudes des français à l’égard des
homosexuels. Néanmoins, ils sont quasi unanimes sur le fait qu’il y a eu un
changement positif chez leurs parents, frères et sœurs, amis et collègues de
travail. Autrement dit : pris un par un, les Français deviennent en majorité
plus tolérants à l’égard de l’homosexualité, avec le temps et sous l’effet de
l’adoption de la loi. En revanche, comme c’est toujours le cas lorsqu’un débat
public a lieu, les mécontents sont plus visibles et organisés, ce qui produit
une impression erronée sur leur nombre et sur la polarisation des Français sur
cette question.
Isabelle Guinaudeau et Raul
Magni-Berton
[1] Les différences par pays ne sont pas représentées dans le tableau car
elles sont redondantes par rapport à la figure précédente.
samedi 8 février 2014
L’intolérance vis-à-vis des immigrés en France : l’environnement des personnes pèse-t-il sur leur xénophobie ? (2)
première partie du texte ici
Des effets contextuels peu sensibles aux caractéristiques individuelles
Des effets contextuels peu sensibles aux caractéristiques individuelles
L’idée est de savoir si les effets
de l’environnement, tels que nous venons de les détailler, peuvent varier entre
les individus en fonction de leurs caractéristiques individuelles. Parmi
l’ensemble des caractéristiques que nous avons ainsi analysées, seules deux
sont statistiquement significatives. Les deux concernent l’effet contact,
c’est-à-dire l’influence de la proportion d’étrangers dans le département
d’habitation ; ce qui signifie que l’effet de compétition, lui ne varie
pas avec les traits particuliers des enquêtés. Arrêtons-nous un instant sur ce
dernier point : un taux de chômage élevé produit plus de xénophobie aussi
bien chez les individus instruits ou très qualifiés que chez ceux qui ont un
faible niveau d’instruction et de qualification. Cela suggère que ce ne sont
pas spécifiquement les personnes plus exposées à la concurrence des étrangers
qui vont devenir plus intolérants face à une montée du chômage, mais bien
l’ensemble des citoyens. Par conséquent, c’est la situation de vulnérabilité
collective face à la compétition qui rend les gens plus xénophobes et non,
comme les suggère la deuxième version de l’effet de compétition, la
vulnérabilité individuelle.
L’effet contact est tout d’abord
différent selon le niveau de diplôme de la personne (voir la figure ci-dessous).
Ainsi, nous pouvons constater que les plus diplômés (bac plus deux et au-delà)
ont un niveau de tolérance plus élevé, ils sont beaucoup moins sensibles à
l’effet de contact que les moins diplômés. En comparant l’effet de la
proportion d’étrangers dans leur département sur leur niveau de tolérance, la
droite représentant l’effet de contact pour les diplômés a un point de départ
plus élevé et a une pente bien plus faible que pour la droite concernant les
personnes peu diplômées. Ces calculs prédisent qu’avec un tiers d’étrangers
dans un département, il n’y aurait plus de différence entre le niveau de
tolérance des personnes diplômées et ceux des personnes non diplômées.
Effet de contact selon le niveau de diplôme de
l’enquêté
Nous trouvons également une
différence dans l’effet de contact entre les personnes possédant des
compétences professionnelles valorisées sur le marché de l’emploi et celles ne
possédant pas de compétences particulières (figure ci-dessous).
De nouveau, il y a une différence de niveau puisque les personnes à compétences
professionnelles ont un indice de tolérance plus élevé que les personnes
n’ayant pas de compétences particulières. En revanche, le premier groupe n’est
pas sensible à l’effet de contact, car la pente est quasiment nulle. Encore une
fois, donc, ce sont les personnes qui sont les plus vulnérables sur le marché
du travail qui sont à la fois plus xénophobes lorsque les étrangers sont peu
nombreux, et plus tolérantes lorsqu’il y a une forte proportion d’étrangers.
Effet de contact selon le niveau de compétence de
l’enquêté
Des effets contact et compétition
interactifs
Le dernier élément analysé est la
possibilité d’une interaction entre les effets contact et compétition. Autrement
dit, est-ce que la tolérance des personnes est sensible à la présence
d’immigrés quel que soit le niveau de chômage, ou bien est-ce que ces personnes
réagissent-elles différemment à la mixité selon les difficultés économiques de
leur environnement ? Inversement, est-ce que la tolérance des enquêtés
réagit différemment au taux de chômage départemental selon que les enquêtés se
trouvent dans des départements à faible ou à forte proportion
d’étrangers ?
La réponse est sans ambigüité, les
effets contextuels sont interactifs. Ainsi, l’effet de compétition,
c’est-à-dire l’effet du chômage environnant sur la tolérance, est plus marqué
pour les personnes habitant un département où la population immigrée est plus
importante (voir la figure plus bas).
Ces personnes réagissent plus en termes de tolérance à une dégradation de
l’environnement économique que les personnes habitant des départements où la
proportion d’immigrés est plus faible.
Effet de concurrence sur la tolérance selon le
niveau de la proportion d’étrangers
L’effet de contact, c’est-à-dire
l’incidence de la proportion d’immigrés dans l’environnement d’un individu sur sa
tolérance, varie également en fonction du niveau de chômage (voir ci-dessous).
Ainsi, les individus qui se trouvent dans des départements aux taux de chômage
faibles sont sensibles à la présence d’immigrés : plus ils ont
d’opportunité de contact, plus ils sont tolérants. Mais à l’inverse, les
personnes qui habitent dans des départements plus affectés économiquement ne
réagissent pas à la présence d’immigrés dans leur environnement, ce qui signifie
que le contact avec des immigrés ne les rends ni plus tolérants ni plus
xénophobes.
Effet de contact sur la tolérance selon le niveau
du taux de chômage
Pour conclure, notre travail montre
bien que le niveau de tolérance des français vis-à-vis des immigrés dépend
d’éléments contextuels au travers à la fois d’un effet positif de contact et
d’un effet négatif de compétition. Il montre également que ces effets dépendent
peu des caractéristiques des personnes. En revanche, les deux éléments
interagissent dans l’explication de la tolérance. L’effet de compétition est
plus fort pour les personnes vivant dans des départements où la présence
d’immigration est plus importante. Et l’effet de contact n’induit de la
tolérance que pour les personnes vivant dans des départements où la situation
économique est plus favorable.
Or, ces résultats reposent sur une
enquête menée avant la crise économique qui a débuté fin 2008 et qui s’est
traduite par une augmentation du chômage. D’après nos explications, cette
aggravation devrait se traduire par un regain de l’intolérance et de la
xénophobie, ce qui peut modifier au final les enjeux électoraux à venir ainsi
que les comportements de vote.
Ce texte s'appuie sur un article publié dans la revue française de sociologie.
L’intolérance vis-à-vis des immigrés en France : l’environnement des personnes pèse-t-il sur leur xénophobie ? (1)
Les enjeux liés à la xénophobie
et les attitudes à l’égard des immigrés sont de plus en plus saillants en
France. D’une part, et selon l’OCDE, la France fait partie des cinq pays industrialisés
ayant la plus forte proportion de population immigrée. D’autre part, la faible
croissance de cette population durant ces dernières décennies a coïncidé avec
les succès électoraux du Front National, ainsi qu’avec la création d’un
ministère de l’immigration et l’identité nationale et les nombreux débats qui
en ont découlé y compris ceux animés par ce ministère. Curieusement, et
paradoxalement, une analyse détaillée et exhaustive des causes de la xénophobie
en France n’a pas encore été menée.
De nombreux travaux ont cherché
à comprendre les logiques du vote en faveur de l’extrême droite, d’autres ont
fourni un descriptif précis et global des tendances xénophobes en France, mais
aucune étude n’a directement analysé les facteurs qui peuvent rendre les
français plus ou moins xénophobes ou inversement plus ou moins tolérants, et
ce, indépendamment de leurs idées politiques. Or, aujourd’hui, avec les volets
français des enquêtes internationales, il est possible d’étudier les logiques
de la tolérance à l’aide de questionnaires robustes et fiables.
Parmi les logiques de la
tolérance, deux effets contextuels, c’est-à-dire liés à l’environnement des
personnes, sont traditionnellement mis en avant par les études internationales,
mais n’ont jusqu’à présent jamais fait l’objet d’une validation empirique en
France. Il s’agit de l’effet contact et de l’effet compétition.
L’effet contact : les
opportunités d’échange mènent à la tolérance
L’hypothèse d’un effet de
contact soutient que le contact personnel entre membres de groupes différents
va produire des niveaux plus faibles d’attitudes négatives à l’égard des
membres des autres groupes. L’interprétation psychologique de cette relation
causale repose sur l’idée que le contact personnel produit empathie et familiarité
et conduit par là à réduire les préjugés et les différences perçues. A
l’origine, ce mécanisme concernait les différences raciales aux Etats-Unis,
mais il a été appliqué avec succès à la question de l’immigration et de la
xénophobie. Selon l’effet contact, plus il y a d’étrangers dans l’entourage
d’un natif, plus ce dernier sera tolérant.
A partir de l’European Survey
Value, on peut mesurer la tolérance moyenne dans
les départements français couvert par l’étude. Ce « niveau
départemental » de tolérance peut être associé à la plus ou moins grande
présence d’individus d’origine étrangère dans le département. La Figure ci-dessous montre clairement que la tolérance dans un département est positivement
associée avec une plus forte proportion d’étrangers qui y résident.
Tolérance moyenne par département et proportion de
population étrangère
Note : le point anormal en haut à gauche de la
figure correspond au Cantal qui regroupe 8 individus dans l’enquête, qui font
preuve d’une forte tolérance.
Cet effet au niveau départemental
est confirmé par notre étude au niveau individuel. Un individu est d’autant
plus tolérant vis-à-vis de l’immigration qu’il vit dans un département où la
proportion d’étrangers est importante, une fois les autres facteurs explicatifs
de la tolérance contrôlés. Cet effet, statistiquement significatif, est d’une
ampleur relativement importante, puisque lorsque la proportion départementale
d’immigrés augmente de 1%, l’indice de tolérance d’une personne augmente de
0,04%.
L’effet compétition : quand
la concurrence économique mène à l’intolérance
Selon l’hypothèse d’un effet de compétition, quand les
migrants ont les mêmes compétences sur le marché du travail que les natifs, ils
entrent en concurrence avec ces derniers et tendent, pour cette raison, à être
rejetés. Deux mécanismes psychologiques sous-jacents peuvent être distingués.
Un premier mécanisme repose sur l’idée qu’un niveau élevé
de solidarité à l’intérieur d’un groupe peut produire des attitudes hostiles à
l’égard des membres des autres groupes, s’ils sont perçus comme des menaces.
Dans ce cas, chaque individu est motivé par une solidarité et une attitude
« socio-tropique » spécifiquement réservée aux membres du groupe
auquel il s’identifie. Par conséquent, ces individus n’ont pas besoin de se
sentir eux-mêmes menacés par la concurrence des immigrés : il suffit
qu’ils pensent que les membres de leur groupe le soient.
Le second mécanisme psychologique, en
revanche, est basé sur une compétition individuelle et est alternatif à
l’hypothèse de contact. L’idée est que l’interaction entre natifs et immigrés
produit de la coopération, sauf s’ils sont en concurrence sur le marché du
travail. Dans ce cas, l’interaction produit un rejet des immigrés et de
l’intolérance. Ce mécanisme est utilisé pour expliquer, par exemple, la plus
grande intolérance parmi les natifs ayant un faible niveau d’études ou de
qualifications professionnelles.
L’intensité de la compétition sur
le marché du travail est mensurée par le taux de chômage dans chaque
département. Lorsque le chômage est élevé, les places sont chères et la
compétition est accrue. La Figure ci-dessous montre bien une relation négative entre le niveau moyen de tolérance et le taux
de chômage. De nouveau, cette relation est confirmée au niveau
individuel : une augmentation de 1% du taux de chômage départemental d’une
personne entraîne une diminution de son indice de tolérance de 0,1% ; et
ce, une fois pris en compte les autres facteurs d’explication de la tolérance
individuelle.
Tolérance moyenne par département et taux de
chômage
Note : le point anormal en haut à gauche de la
figure correspond au Cantal qui regroupe 8 individus dans l’enquête, qui font
preuve d’une forte tolérance.
Il apparaît ainsi que les niveaux
de tolérance ou d’intolérance des français vis-à-vis de l’immigration, sont
influencés par leur environnement et, plus précisément, par un effet contact
ainsi qu’un effet compétition. Pour autant, il faut poursuivre l’analyse de
manière à savoir si, d’une part, ces deux effets peuvent être influencés par
des caractéristiques individuelles et, d’autre part, ces deux effets
interagissent entre eux, ou non.
La suite ici
Abel François
et Raul-Magni-Berton
La suite ici
Abel François
et Raul-Magni-Berton
Ce texte s'appuie sur un article publié dans la revue française de sociologie.
vendredi 7 février 2014
Dieudonné et Grillo. Défiance des citoyens et succès politique des comiques
En février
2013, pour sa première apparition aux élections nationales italienne, le
mouvement fondé par le comique Beppe Grillo devient le parti le plus voté
d’Italie, avec 25,5% des voix. Quelques jours après, sur le site internet du
CRIF, un article le décrivait comme le « Dieudonné italien » et
l’accusait d’anti-sémitisme. A vrai dire, personne en Italie n’a pris au
sérieux cette accusation à l’encontre de Grillo et, sur ce point, l’article a
raté sa comparaison. Dommage, parce que Grillo et Dieudonné ont un parcours
étonnamment similaire, qu’il vaut la peine de retracer.
1. Les deux
sont des comiques, devenus porteurs de messages politiques.
2. Les deux
ont étés boudés par la télévision, suite à des sketchs qui ont particulièrement
suscité la polémique. Grillo en 1987, pour ses propos contre le chef du
gouvernement italien, Dieudonné en 2003, pour ses propos contre Israël.
3. Les deux
ont radicalisé leur position, suite à ces événements, et leur public les a
suivis et soutenus. Leurs spectacles restaient très populaires.
4. Les deux
ont commencé à utiliser les médias sociaux, avec un succès phénoménal. En
particulier, si vous cherchez « François Hollande » ou « Manuel
Valls » sur Youtube, vous trouverez que les vidéos les plus vues sont
celles où Dieudonné parle d’eux. Le même phénomène arrive depuis quelques
années en Italie : Youtube était devenue, en quelque sorte, la télévision
de Grillo et de ses sympathisants.
5. Les deux
sont devenus porteurs de messages d’associations, organisations ou événements
peu médiatisés jusque-là. Ils deviennent, par là même, beaucoup mieux informés
sur des faits mal connus, et transmettent l’idée qu’ils informent le public
autrement – et mieux. En outre, leur hostilité au « politiquement correct »
– dont les deux ont été victimes – les porte à s’associer à des individus ou
des mouvements qui, comme eux, ont mauvaise réputation.
6. Les deux
ont rencontré un rejet quasi unanime des pouvoirs politiques, et sont souvent
comparés à des personnages tels que Hitler ou Mussolini.
7. Les
deux, pour finir, rejettent à leur tour le « système ». Ils s’en
prennent d’abord aux médias puis, progressivement, aux hommes politiques. Avec
des symboles qui deviennent très populaires (le V-day de Grillo et la
quenelle de Dieudonné) qui véhiculent l’idée de les envoyer tous, pour le dire
joliment, sur les roses.
Alors,
s’agit-il d’une coïncidence ? Ou, au contraire, doit-on voir là une
logique propre à notre époque ?
Quelques
éléments peuvent suggérer qu’il s’agisse de la deuxième option. Leur statut de
comique, tout d’abord, permet de comprendre pourquoi ces individus avaient
« leur » public, indépendamment de leurs passages à la télévision.
D’autres personnages ont été boudés par les médias pour leurs opinions –
journalistes, intellectuels, acteurs ou animateurs – mais ils manquaient de
public pour continuer à rester suffisamment visibles. Les comiques, eux,
survivent au choc.
Deuxièmement,
le développement des médias sociaux, comme l’ont souligné de nombreuses études,
notamment sur le printemps arabe, sont un outil fondamental de coordination.
Les moins de 30 ans, sont davantage exposés à Youtube qu’à la télévision et
c’est via Internet que la plupart des événements sont diffusés parmi les
jeunes.
Pour
parvenir à un tel niveau de popularité, néanmoins, il faut que nos comiques
aient pu conquérir d’autres personnes, qui n’étaient pas initialement dans leur
public. Deux autres mécanismes permettent de comprendre l’élargissement de
l’audience des deux humoristes.
D’abord, du
fait de leur visibilité croissante, ils sont systématiquement contactés par des
associations ou organisations qui souhaitent avoir des opportunités de diffuser
leurs messages, en cas de compatibilité avec les opinions de ces personnes. Les
membres de ces associations, en retour, soutiennent leur homme.
Mais
fondamentalement, il faut que leur message ou leur protestation soit ressentie
comme juste par une partie de la population. Le terrain favorable est là, aussi
bien en France, qu’en Italie, que dans de nombreux autres pays. La confiance
générale dans les médias est en forte baisse depuis 30 ans. En ce qui concerne
les partis politiques et les hommes et femmes politiques, la baisse de
confiance est impressionnante.
L’une des
raisons, est que la concurrence entre partis politiques – censée refléter la
concurrence des opinions au sein de la population – se transforme, progressivement,
en une sorte de coopération. Il s’agit de ce que Peter Mair appelait le
« parti cartel » : la tendance des 30 dernières années à une
stabilisation du système démocratique à travers la coopération des principaux pouvoirs.
La force
d’un système démocratique consiste traditionnellement à inclure les mouvements
de masse. Lorsqu’un mouvement large se forme, on trouve toujours un parti et
une presse pour les représenter. Ce mécanisme d’inclusion des voix dissonantes
est, en principe, basé sur la compétition des partis politiques (et, plus
généralement, sur l’équilibre des pouvoirs). En visant le plus grand soutien
électoral possible, les partis sont censés inclure les revendications de masse
venues de la société civile.
Aujourd’hui,
nos systèmes démocratiques tendent à exclure ces voix dissonantes. La récente
initiative du ministre de l’intérieur visant à interdire les spectacles de
Dieudonné – initiative saluée par la quasi totalité des forces politiques – vise
non pas à « représenter » des électeurs potentiels, mais à les « éduquer ».
Et ceci, sans craindre les répercussions électorales, car les autres principaux
partis n’ont pas contesté l’initiative.
Cela a pour
conséquence que Dieudonné, à l’instar de Grillo, voit sa popularité exploser,
du fait même de leur condamnation par l’ensemble des pouvoirs forts. Ils
deviennent alors véritablement seuls, contre le « système ». Ils
deviennent aussi un parti et un média à eux seuls, parce qu’il représentent
toutes les personnes qui se sentent victimes de cette démocratie oligarchique.
Raul Magni-Berton
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Raul Magni-Berton
mardi 4 février 2014
Hollande et les sondages: les limites du modèle politique français
Les taux de popularité de François Hollande ont atteint un nouveau record négatif. en passant en dessous de la barre de 20 pour cent selon un sondage réalisé début février. Cette popularité anormalement basse pose question. Certains appellent à dissoudre l'Assemblée nationale, d'autres même à la démission du président. Et pourtant, l'impopularité du président n'est pas un phénomène nouveau. Elle découle des attentes excessives qu'ont les électeurs vis-à-vis de leur président.
L'origine de ces attentes est à chercher dans le code génétique des institutions de la 5e République, de plus en plus inadapté à la réalité de la vie politique. La 5e République a des mérites indéniables. Elle a permis, dans un contexte politique particulier, de sauvegarder la République. Alors que celle-ci était menacée, les constituants de 1958 ont placé tous leurs espoirs dans la personne du Général de Gaulle. Malgré les critiques de ce régime, la distance historique permet de porter un jugement très positif sur ce changement. Mais c'est cette distance historique qui nous permet aussi de juger ce régime aujourd'hui comme complètement obsolète.
Nombre de choses ont changé depuis l'époque du Général de Gaulle. Nos gouvernements sont désormais pris dans un filet complexe de réglementations européennes et internationales qui contraignent fortement l'autonomie des gouvernants. La libre circulation des capitaux et la monnaie unique ancrent la France dans l'économie européennes et mondiale. Nos produits et nos emplois sont en concurrence permanente avec ceux de pays à l'autre bout du globe.
Et pourtant, les institutions et la compétition politique en France restent tributaires de la vision politique du général de Gaulle. La principale échéance électorale, l'élection présidentielle, oppose des individus qui doivent faire croire qu'ils pourront, à eux seuls, remettre en route l'économie et l'emploi, accroître l'influence de la France dans le monde et dans l'Union européenne, combattre la fracture sociale et améliorer le sentiment de sécurité. La fonction présidentielle est ainsi faite : elle doit être incarnée par un homme providentiel investi de tous nos espoirs et attentes. Et la victoire est au prix de promesses de campagne ambitieuses et fondamentalement irréalistes.
Le contraste est saisissant avec les récentes élections législatives en Allemagne, où le principal message du gouvernement sortant a consisté à promettre plus de la même chose : « pour que l'Allemagne continue à être bien gouvernée », pouvait-on lire sur l'une des principales affiches électorales. Le système politique allemand ne fait pas, en effet, reposer toute la responsabilité des politiques sur les seules épaules du chancelier. Le chancelier est avant tout un courtier politique qui doit faire coexister un grand nombre de parties et d'institutions. C'est l'ensemble de ces acteurs qui est alors tenu responsable des résultats et non pas le seul chef de l'exécutif.
Étant donné l'interdépendance croissante de la France vis-à-vis de ses partenaires, les promesses des présidents se révèlent rapidement intenables. En effet, le président français ne peut ni relancer la croissance à lui tout seul, ni réformer la finance internationale et encore moins les traités européens. La déception est alors à la hauteur de l'ambition des promesses. Et ce n'est pas nouveau (voir aussi cette note de l'IFOP). La chute vertigineuse de la popularité de François Hollande n'a certes pas d'égal dans l'histoire de la 5e République comme le montre le graphique ci-dessous (données IFOP), mais ses deux prédécesseurs ont tous les deux battu des records d'impopularité. Giscard et Mitterrand, malgré des hauts et de bas, n'avaient pas connu des périodes de déclin aussi longues.
En effet, depuis désormais vingt ans, les Français sont de plus en plus rapidement et de plus en plus fortement déçus de leurs présidents. Ils ont tous une popularité 'nette' (c'est-à-dire les bonnes opinions moins les mauvaises opinions) importante au début de leurs mandats, mais celle-ci dégringole très rapidement. Mais surtout, contrairement à ce qui a pu se passer pour les présidents précédents, les trois derniers présidents ne s'en remettent pas. Les symptômes et les conséquences sont connues : une désaffection croissante pour les partis et les politiques, des alternances presque systématiques, des votes pour des partis populistes pour ne citer que les phénomènes les plus connus.
Et cela ne risque pas de changer, tant que la principale échéance électorale consistera à élire un homme providentiel, capable de trouver seul des solutions à tous les problèmes de la France, de l'Europe et au-delà. Gouverner est aujourd'hui un acte collectif, impliquant un grand nombre d'acteurs gouvernementaux et sociétaux, publics e privés, nationaux et internationaux. Et les institutions doivent éviter de faire croire qu'il en est autrement. Les débats sur la réforme des institutions reviennent régulièrement, mais aucune des forces politiques présentes ne semble déterminée à s'y lancer sérieusement. C'est pourtant de plus en plus urgent. Seul un plus grand équilibre des pouvoirs peut permettre de renouveler la confiance des électeurs dans les politiques en proposant une image plus réaliste des responsabilités et des capacités de nos gouvernants. Et au vu des défis qui les attendent, ils auront besoin de cette confiance.
Emiliano Grossman
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L'origine de ces attentes est à chercher dans le code génétique des institutions de la 5e République, de plus en plus inadapté à la réalité de la vie politique. La 5e République a des mérites indéniables. Elle a permis, dans un contexte politique particulier, de sauvegarder la République. Alors que celle-ci était menacée, les constituants de 1958 ont placé tous leurs espoirs dans la personne du Général de Gaulle. Malgré les critiques de ce régime, la distance historique permet de porter un jugement très positif sur ce changement. Mais c'est cette distance historique qui nous permet aussi de juger ce régime aujourd'hui comme complètement obsolète.
Nombre de choses ont changé depuis l'époque du Général de Gaulle. Nos gouvernements sont désormais pris dans un filet complexe de réglementations européennes et internationales qui contraignent fortement l'autonomie des gouvernants. La libre circulation des capitaux et la monnaie unique ancrent la France dans l'économie européennes et mondiale. Nos produits et nos emplois sont en concurrence permanente avec ceux de pays à l'autre bout du globe.
Et pourtant, les institutions et la compétition politique en France restent tributaires de la vision politique du général de Gaulle. La principale échéance électorale, l'élection présidentielle, oppose des individus qui doivent faire croire qu'ils pourront, à eux seuls, remettre en route l'économie et l'emploi, accroître l'influence de la France dans le monde et dans l'Union européenne, combattre la fracture sociale et améliorer le sentiment de sécurité. La fonction présidentielle est ainsi faite : elle doit être incarnée par un homme providentiel investi de tous nos espoirs et attentes. Et la victoire est au prix de promesses de campagne ambitieuses et fondamentalement irréalistes.
Le contraste est saisissant avec les récentes élections législatives en Allemagne, où le principal message du gouvernement sortant a consisté à promettre plus de la même chose : « pour que l'Allemagne continue à être bien gouvernée », pouvait-on lire sur l'une des principales affiches électorales. Le système politique allemand ne fait pas, en effet, reposer toute la responsabilité des politiques sur les seules épaules du chancelier. Le chancelier est avant tout un courtier politique qui doit faire coexister un grand nombre de parties et d'institutions. C'est l'ensemble de ces acteurs qui est alors tenu responsable des résultats et non pas le seul chef de l'exécutif.
Étant donné l'interdépendance croissante de la France vis-à-vis de ses partenaires, les promesses des présidents se révèlent rapidement intenables. En effet, le président français ne peut ni relancer la croissance à lui tout seul, ni réformer la finance internationale et encore moins les traités européens. La déception est alors à la hauteur de l'ambition des promesses. Et ce n'est pas nouveau (voir aussi cette note de l'IFOP). La chute vertigineuse de la popularité de François Hollande n'a certes pas d'égal dans l'histoire de la 5e République comme le montre le graphique ci-dessous (données IFOP), mais ses deux prédécesseurs ont tous les deux battu des records d'impopularité. Giscard et Mitterrand, malgré des hauts et de bas, n'avaient pas connu des périodes de déclin aussi longues.
En effet, depuis désormais vingt ans, les Français sont de plus en plus rapidement et de plus en plus fortement déçus de leurs présidents. Ils ont tous une popularité 'nette' (c'est-à-dire les bonnes opinions moins les mauvaises opinions) importante au début de leurs mandats, mais celle-ci dégringole très rapidement. Mais surtout, contrairement à ce qui a pu se passer pour les présidents précédents, les trois derniers présidents ne s'en remettent pas. Les symptômes et les conséquences sont connues : une désaffection croissante pour les partis et les politiques, des alternances presque systématiques, des votes pour des partis populistes pour ne citer que les phénomènes les plus connus.
Emiliano Grossman
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